Muazzez Kerricha, âgée de 82 ans, se souvient avec douleur ce lundi 3 février des événements tragiques du massacre de Hama, survenu en 1982.
À cette époque, elle a été forcée de faire un choix déchirant entre ses deux fils alors que les forces du régime baasiste s’attaquaient sans merci à sa ville. Depuis ce jour, elle n’a plus eu de nouvelles de son frère, disparu à l’époque.
Le massacre, survenu au début de février 1982, a été l’un des moments les plus sombres de l’histoire de la Syrie. Alors que le régime baasiste de Hafez al-Assad imposait une répression féroce, les habitants de Hama se retrouvaient pris au piège. Kerricha se souvient des bruits des avions et des bombardements de chars qui secouaient la ville.
“Nous avons entendu les avions, puis les bombardements ont commencé,” raconte-t-elle, la voix chargée de tristesse. C’était le début de plusieurs jours d’horreur.
Le pire moment de sa vie a été celui où elle a été contrainte d’abandonner son fils aîné, Majid, pour sauver son plus jeune. “Je me sentais désespérée. Je savais qu’ils allaient les exécuter. J’ai dû faire ce choix pour protéger mon autre fils,” confie-t-elle, le cœur lourd. Après son départ, Majid ne rentrera que 13 ans plus tard, découvrant que son père était décédé entre-temps.
Les attaques ont duré plusieurs jours, plongeant la ville dans la terreur. Le régime a arrêté de nombreux jeunes hommes, y compris son mari. Kerricha a quitté sa maison pour chercher la fille de son frère, mais ce qu’elle a vu sur son chemin la hantera à jamais : des cadavres jonchant les rues, victimes des soldats du régime.
Pour Majid, cette expérience a été marquée par la peur constante de la mort. “Je me suis sacrifié pour que ma mère puisse sauver mon frère. Nous avons été emmenés dans une usine, et l’horreur que nous avons vécue là-bas était indescriptible,” raconte-t-il. Les tortures qu’il a subies, ainsi que les exécutions, l’ont profondément marqué.
Après un mois dans cette usine, il a été transféré à la tristement célèbre prison de Tadmor, où il sera torturé pendant 13 ans.
Aujourd’hui, après la chute du régime baasiste en 2024, les survivants du massacre de Hama réclament justice. Après des décennies de silence imposé par le régime, les voix des victimes se font enfin entendre.
Les forces anti-régime, ayant pris le contrôle de la Syrie, travaillent à la réconciliation, mais les cicatrices laissées par le Baas sont profondes.
Le règne de 61 ans du Baas et les 53 années de pouvoir des Assad ont pris fin, mais pour beaucoup, la quête de vérité et de justice continue.