Du 10 au 13 mars 2025, la ville de Fribourg a accueilli un forum international de haut niveau consacré à la gouvernance des ressources naturelles et minières en République Démocratique du Congo (RDC).
Cet événement majeur, organisé conjointement par le Centre d’Amitié Suisse-RDC et l’Institut du Fédéralisme de l’Université de Fribourg, a réuni une délégation congolaise de premier plan. Parmi les participants figuraient des représentants de l’Inspection générale des mines, du Ministère des Mines ainsi que de la Direction Générale des Impôts (DGI).
Les discussions ont principalement porté sur la fiscalité des ressources naturelles en RDC et l’étude du modèle fiscal suisse.
L’un des points centraux abordés concernait l’imposition des ressources naturelles et les nombreux défis qui en découlent. Les débats ont mis en lumière des problématiques telles que la surexploitation des richesses du sous-sol, la volatilité des revenus qu’elles génèrent et les risques associés à la “malédiction des ressources”, notamment la corruption, l’instabilité politique et le manque de diversification économique.
Une attention particulière a été accordée aux avantages et limites des modèles centralisés et décentralisés de taxation, ainsi qu’aux mécanismes de redistribution fiscale, qui peuvent favoriser une meilleure gestion des ressources.
Par ailleurs, l’analyse du système fiscal suisse a permis d’explorer son organisation marquée par une forte autonomie cantonale et les dynamiques de concurrence fiscale qui en résultent. Des stratégies visant à atténuer ces effets ont été discutées, notamment la péréquation financière.
Les réformes fiscales en cours, comme l’introduction d’un impôt complémentaire sur les bénéfices et la transition vers une imposition individuelle des contribuables mariés, ont été présentées comme des avancées significatives.
Les échanges ont ainsi permis d’offrir une approche comparative enrichissante, favorisant l’identification de pistes d’adaptation et d’amélioration des systèmes fiscaux en fonction des réalités économiques et institutionnelles propres à chaque pays.
Deux interventions majeures ont marqué la clôture du forum le jeudi 13 mars 2025 : celles du Professeur Jérémy Laurent-Lucchetti, économiste à l’Université de Genève, et du Professeur Diemu Tshiband Bavon, spécialiste en géologie sédimentaire et enseignant à l’Université de Kinshasa en RDC.
Dans son exposé, le Professeur Laurent-Lucchetti a mis en évidence les paradoxes économiques de la RDC, un pays dont les réserves minières sont estimées à 24 000 milliards de dollars. Malgré une demande mondiale croissante en cobalt, cuivre et lithium, le pays demeure dans une situation économique précaire.
La volatilité des prix et la corruption aggravent cette dépendance, entraînant des conséquences sanitaires et sociales alarmantes : maladies respiratoires, pollution des eaux, mortalité infantile élevée et conflits autour des sites miniers.
Pour faire face à ces défis, plusieurs solutions ont été proposées, notamment la diversification économique, la réinjection des revenus miniers dans les infrastructures publiques, le renforcement des mécanismes de régulation pour lutter contre la pollution et améliorer la traçabilité des minerais, ainsi que le développement d’une industrie locale de transformation des ressources.
De son côté, le Professeur Diemu Tshiband Bavon a exposé les difficultés du secteur pétrolier congolais, qui peine à attirer des investissements malgré le potentiel des bassins sédimentaires.
Avec une production limitée à 25 000 barils par jour et l’absence d’un cadastre pétrolier clair, la transparence et les investissements sont freinés. Il a également abordé la fiscalité appliquée aux énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse), soulignant la nécessité de favoriser leur essor sans entraver leur développement.
Pour remédier à ces problèmes, il a recommandé la création d’un cadastre pétrolier, une réforme fiscale plus incitative pour les investisseurs, l’établissement d’un cadre fiscal clair pour les énergies renouvelables et la promotion de la formation et de la recherche dans le secteur énergétique.
Lors de la clôture du forum, John Musengie, Directeur des grandes entreprises à la DGI et chef de la délégation congolaise, a rappelé les missions essentielles de son institution et salué cette initiative de coopération entre la Suisse et la RDC, portée par l’Institut du Fédéralisme.
Enfin, les délégations ont participé à deux activités majeures : une visite à la Prison de la Tour de la Démocratie et une rencontre avec Son Excellence Monsieur Symphorien Mutombo Bafakwa Nsenda, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la RDC à Berne.